Cet interview a été réalisé en avril 2001
dans le service de chirurgie orthopédique pédiatrique de l’hôpital
Robert DEBRÉ - 48, Bd Serrurier 75019 PARIS.
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Le pied
bot varus équin est un trouble du développement du pied pendant la
vie
intra-utérine. C’est
une malformation congénital.
Les
études échographiques ont permis d’en savoir un peu plus sur son
mécanisme :
Tous
les embryons jusqu'à l'âge de 7 semaines de grossesse ont les deux
pieds en position de pied bot. L’embryon ne mesure encore que
30 mm.
Au
cours de la septième semaine de grossesse, un mouvement de rotation,
normalement, permet aux pieds de se mettre en position
plantigrade. Ce mouvement ne se fait pas chez les enfants porteurs de pied
bot. L'origine de cette anomalie n'est pour l'instant pas connue.
Vous trouverez ci-dessous les
informations précises sur les sujets suivant :
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La consultation
anténatale, son rôle
La consultation postnatale avec le médecin orthopédiste
Les examens complémentaires
Évaluation des malformations à la naissance
Surveillance de l'évolution
Évolution au cours de la croissance
Les traitements
La chirurgie
Quels critères pour opérer ?
L'intervention
Protocole de l'intervention
Les récidives
Les séquelles
Malgré la découverte à l’échographie de cette anomalie, la
consultation anténatale avec un orthopédiste pédiatrique est
rarement réalisée.
En effet, dans la plupart des cas, la consultation anténatale a pour but
de discuter d'une éventuelle interruption de grossesse or ce problème ne se
pose pas dans le cas d'un diagnostic de pied bot
isolé.
Il est cependant souhaitable que les parents dont l'enfant doit être
porteur de cette affection puisse avoir une consultation avec un
chirurgien spécialisé. Cette consultation permet de montrer des photos, d’expliquer que si la lésion
est isolée la marche se fera à l'âge normal et avec des chaussures
normales.
Il est important, à ce moment d'informer les parents du temps nécessaire
à la réalisation de la rééducation.
Ils peuvent en effet avoir besoin d'organiser leur vie professionnelle et
familiale en ce sens.
A l’hôpital
Robert Debré, au cours de la consultation
avec le chirurgien, les parents vont dans le service de rééducation.
Ils peuvent ainsi rencontrer des kinésithérapeutes, voir des enfants
porteurs de cette malformation et discuter avec leurs parents.
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Cette consultation va permettre au médecin spécialiste d’établir un
bilan, c'est-à-dire une description des déformations. Il
permet d'orienter le traitement.
Le médecin manipule le pied, mobilise les articulations et stimule les
muscles.
Cet examen permet de confirmer le diagnostic.
Dans le PBVE les déformations ne sont que partiellement réductibles
et à aucun moment de l’examen, le pied ne peut être remis dans une
position normale.
Cet examen doit être complété par un examen clinique des hanches
et de la colonne vertébrale.
A la fin de ce bilan il est souvent possible d'éliminer une malformation
siégeant à un autre endroit.
Il est important de souligner que tous les médecins qui examinent
l’enfant, le médecin qui pratique l’échographie
anténatale,
le pédiatre, le chirurgien, le radiologue, essaient le plus possible de
s’assurer du caractère isolé de ce PBVE.
Cependant, le caractère idiopathique du
pied bot ne sera réellement
confirmé qu'au fil des années.
En effet, des pieds bots qui semblent à la naissance, isolés,
peuvent présenter ultérieurement une évolution avec des récidives
qui font craindre une origine neurologique.
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Des radiographies des pieds sont réalisées.
Elles sont faites de face et de profil en maintenant le pied dans la position
maximum de correction.
Sont également réalisées des radiographies de la colonne vertébrale,
une échographie médullaire et une
échographie des hanches à l’âge
d’un mois. (Il est classique de décrire une association entre la déformation
des pieds et une instabilité de hanche.)
Là encore, les examens de la colonne vertébrale et des hanches sont
faits pour essayer le plus possible de dépister ou d'éliminer une malformation
associée.
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Chacune des déformations est mesurée en degrés : Il est noté la déformation spontanée sans toucher au pied, et la
déformation après manipulations, c’est à dire celle que l'on
obtient quand on essaie de redresser le pied.
On peut donc décrire le degré de réductibilité témoin de la souplesse
articulaire et la déformation résiduelle témoin des rétractions
musculaires ou articulaires.
Les déformations principales du pied bot sont :
Le varus (la plante du pied regarde en dedans).
L'équin (la plante du pied regarde en arrière et il est impossible de relever
le pied vers la partie antérieure de la
jambe).
La rotation et l’adduction, ces déformations tournent le pied vers l’intérieur
comme quand on marche les pieds en dedans.

Toute ces déformations se combinent entre elles à des degrés diverses
pour former des pieds bots plus ou moins sévères.
A la naissance on précise également s'il existe des anomalies de la
peau.
On note la présence de sillons plus ou moins importants. Ils sont les témoins
de la rétraction des tissus plus profonds. La malléole interne est
souvent difficile à palper, alors qu’elle est, d’habitude, saillante sous
la peau.
Enfin, l'examinateur stimule les muscles pour rechercher une faiblesse des
muscles releveurs du pied. Les muscles qui verrouillent la position du pied
bot sont rétractés et souvent hypertoniques alors que les muscles qui font
le mouvement contraire ont été distendus et leur contraction est souvent
inefficace surtout dans les premières semaines.
Par la
suite, grâce à la rééducation, ils reprennent de la force mais il persiste
longtemps un déséquilibre des forces qui explique en partie les troubles de
croissance à l’origine de certaines récidives.
A la fin de cette consultation, le médecin explique le traitement aux
parents.
Il insiste sur l'importance d'une rééducation très bien réalisée.
Enfin, il évoque la possibilité de devoir pratiquer une intervention
chirurgicale dans les années à venir.
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Une autre consultation est effectuée à l'âge de 1 mois de façon à
analyser les résultats des examens complémentaires demandés au moment de la
première consultation.
A cette occasion, il est également possible d'observer la qualité de la
réduction puisque le traitement kinésithérapique
est déjà commencé.
L'évolution dans le premier mois est souvent très spectaculaire.
Le pied est presque correctement aligné et c'est un
examen clinique approfondi qui permettra de constater qu'une partie des déformations, en
particulier l'équin, persistent.
Les consultations sont renouvelées tous les trois mois jusqu'à l'âge de
dix-huit mois.
Ensuite, si l'évolution est favorable elles sont espacées tous les six
mois puis tous les ans.
Une surveillance clinique et radiographique est indispensable
jusqu'à la fin de la croissance.
En effet, c’est à l’âge de six ans et ensuite au moment de la puberté
qu’un certain nombre de pieds bots qui jusque-là présentaient un
bon résultat peuvent récidiver.
Ces récidives sont souvent en rapport avec un petit trouble de
croissance augmenté ou créé par un déséquilibre de force entre les différents
muscles du pied.
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Grâce à la rééducation, l'évolution est souvent très importante dans
les trois premiers mois.
Elle est en général beaucoup plus ralentie entre 3 et 9 mois.
Cependant, il est toujours très important de poursuivre les manipulations
de façon à maintenir les acquis. En effet, à la différence de l'adulte
pour lequel les os et les articulations ont leurs tailles définitives, chez
les enfants, le pied va augmenter en longueur et en épaisseur.
Un petit trouble de la vitesse de croissance d'un des deux côtés du pied
risquent de se dévoiler au moment des poussées de croissance.
Ces troubles de croissance imposent une surveillance attentive pour les
rechercher.
Ils expliquent également la raison pour laquelle la rééducation
ne doit pas être relâchée et le port d'appareils de nuit presque
toujours nécessaires les deux premières années.
Ensuite, au moment de l'acquisition de la marche, certaines petites déformations
résiduelles peuvent se réduire spontanément sous l’effet des
mobilisations induites par la marche. Par contre, des déformations plus
importantes risquent de s'aggraver imposant une intervention chirurgicale. Après
l'âge de deux ans, un pied qui n'a pas été opéré, s'il est bien mobile,
bien aligné, à peu de risques de nécessiter une intervention chirurgicale.
Que le pied ait été opéré ou non, après l'acquisition de la marche, la
fonction du pied permet de parfaire les résultats.
Actuellement, si elle est nécessaire, une intervention chirurgicale est réalisée
entre l’âge de
un et deux ans.
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Actuellement, dans le monde, deux techniques sont proposées pour le
traitement du pied bot.
La première, décrite par le professeur PONSETI aux États-Unis consiste en la
réalisation de plâtres.
Ces plâtres cruro-pédieux (ils enferment la
« jambe », de la cuisse jusqu’au bout du pied ) sont réalisés
tous les huit jours. Ils sont faits en position de correction progressive.
Au décours de ce traitement, une petite intervention est
souvent réalisée, qui consiste à allonger
par une petite incision le tendon d'Achille.
Cette technique très
répandue aux États-Unis est en partie due au contexte socio-économique car
elle est très intéressante sur le plan financier. On peut également noter
un avantage certain lorsqu’il y a un éloignement géographique important,
difficile à gérer pour les soins quotidiens que requiert le traitement
fonctionnel. Ce traitement entièrement effectué par plâtres successifs est
peu pratiqué en France, mais certaines équipes réaliseraient dans un
premier temps des plâtres puis commenceraient la rééducation.
L'autre technique, (le traitement fonctionnel), globalement la plus utilisée en
France consiste en une rééducation immédiate dès les premiers jours. C’est
celle-ci que nous préconisons à l’hôpital Robert Debré et que nous
décrivons ici. Elle a été développée en France par le Professeur
H. BENSAHEL (chirurgien) et Monsieur A. GUILLAUME (kinésithérapeute).
Le principe de cette rééducation est de manipuler doucement le pied pour
l’assouplir et de l'immobiliser de façon souple afin de ne pas déclencher
une réaction de défense de la part du pied.
Après la naissance, le plus important est de débuter la rééducation le
plus rapidement possible.
Ce traitement doit être entrepris, si ce n’est le premier jour, au plus
tard, à la sortie de la maternité.
Il faut dans le même temps, avoir une
consultation spécialisée en orthopédie pédiatrique.
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Actuellement, elle est réalisée, si nécessaire, entre l’âge de
un et deux ans.
Cette période n'a pas été fixée au hasard. Il y a quinze ans des tentatives d'intervention chirurgicale précoce,
avant l'âge de trois mois, ont permis de mettre en évidence les immenses
difficultés d'une intervention sur ce petit pied très
immature.
Le grand nombre de récidives a imposé l'arrêt de ces
interventions précoces.
Dans les années qui ont suivi, les interventions ont été réalisées
lorsque la rééducation ou la succession des plâtres ne permettaient pas
d'obtenir une amélioration satisfaisante des déformations.
Certains pieds ont alors été opérés à quatre, six ou huit mois.
De nouveau, les résultats ne semblaient pas suffisamment performants.
En effet un nombre important de pieds opérés longtemps avant l'acquisition
de la marche peuvent présenter des récidives dès l'âge de deux ans
nécessitant une nouvelle intervention chirurgicale toujours très difficile
à réaliser.
C'est pour cela qu’actuellement nous préférons réaliser cette
intervention sur des enfants qui se tiennent debout et esquissent leurs
premiers pas.
L'objectif est d'obtenir une acquisition très rapide de la marche après
l’ablation des plâtres réalisée lors de l'intervention.
Retour aux sujets
Un pied fonctionnel, est un pied qui repose à plat sur le sol et
dont la flexion dorsale est au-moins de quelques degrés.
Par contre, lorsque l'enfant se tient debout, si l'appui se fait sur le
bord externe de son pied, il ne pourra pas dérouler correctement son pas et
risque de déformer de nouveau son pied.
Si l’enfant n’appuie pas correctement son talon sur le sol, il risque
de déformer le milieu de son pied. Si ces défauts persistent, le pied
n’est pas fonctionnel. Il devient donc indispensable de pratiquer une intervention chirurgicale
pour remettre ce pied dans une position normale de façon à permettre à
l'enfant de marcher avec un pied à plat et qu’il puisse mobiliser sa
cheville à chaque pas.
Retour aux sujets
C’est une intervention qui libère les tensions et rétractions des
tissus mous (tendons, aponévroses,
ligaments, capsules articulaires
). A aucun moment le chirurgien ne touche aux os proprement dits avec son bistouri.
Nous réalisons une ouverture de la peau horizontale sur toute la face
interne du pied, de la base du gros orteil jusqu’au tendon d’Achille.
Le chirurgien allonge les parties rétractées et sectionne les brides de fibrose,
de façon à pouvoir aligner le pied.
A la fin de l'intervention, le pied doit pouvoir être mis à angle droit
sous la jambe et il ne doit pas persister de déformation.
Le chirurgien doit cependant prendre garde à ne pas trop corriger le
pied, ce qui entraînerait des déformations inverses.

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Incision |
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Suture et broches
en fin d'intervention
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Si les deux pieds doivent être opérés, l'intervention est réalisée,
sous anesthésie générale, les deux côtés, le même jour .
En fin d’intervention, le pied est immobilisé par deux broches,
dont
l'une est enlevée huit jours après l'opération.
Le pied est alors enfermé dans un plâtre pour cinq semaines pour
permettre la consolidation.
La cicatrice peut donc être vérifiée avant d'enfermer le pied.
Des médicaments sont donnés de façon suffisante après
l’intervention, dans les premiers jours, pour éviter les douleurs postopératoires.
L'enfant peut rentrer à la maison trois à quatre jours après
l'intervention.
Au bout de cinq semaines, on enlève le plâtre et on retire la dernière
broche.
Le changement de plâtres ou l'ablation des broches est en général
fait en hospitalisation de jour.
La chirurgie sur les pieds bots a bien évolué. La qualité de la rééducation avant l'intervention chirurgicale et la précision
des gestes réalisés ont diminué l'importance de cette intervention.
Au fil des années, la cicatrice est devenue plus petite. Actuellement,
elle ne remonte plus sur le triceps (mollet).
Ces évolutions ont permis d'obtenir des hospitalisations plus courtes et
des douleurs postopératoires moins importantes.
On peut également espérer que des gestes moins importants à l'intérieur
du pied permettent grâce à la rééducation postopératoire que le pied
devienne relativement plus mobile.
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Une récidive est la réapparition de déformations malgré un pied
qui a été correctement aligné par la rééducation ou la chirurgie.
Celles-ci sont toujours très difficile à expliquer et à comprendre.
Le taux de récidives varie en fonction des équipes et des pays
entre 10 % et 30 %.
Certains pieds récidivent car les tissus restent très
fibreux
et raides, d'autres, car il persiste des anomalies des muscles qui orientent
mal le pied et aggravent les troubles de croissance.Leur traitement est toujours très difficile et
commence souvent par la reprise de la rééducation et par des attelles.
Si la récidive ne peut pas être maîtrisée, alors, d'autres
interventions devront être réalisées.
Retour aux sujets
De façon constante,
lorsque le pied bot est unilatéral il existe toujours une
atrophie
de celui-ci par rapport à l'autre côté Un ancien pied bot est plus petit (une pointure)
et étroit qu’un pied normale. Le mollet est plus fin et possède moins de force.
Il existe toujours un peu trop de peau au niveau de la partie externe de
la cheville.
Séquelle fréquente : l’articulation tibio-tarsienne (cheville) est souvent moins mobile.
Séquelles plus rares
: le pied peut être très raide avec persistance de quelques déformations.
Enfin il arrive qu’à l'âge adulte ces pieds, même s’ils permettent
un chaussage normal, soient douloureux après des exercices physiques
importants.
En
conclusion, la collaboration entre un kinésithérapeute bien entraîné à la
manipulation des pieds bots et un
chirurgien habitué à la surveillance de ces pieds, et qui opère
régulièrement, permet d'obtenir le plus souvent des pieds correctement
alignés et mobiles.
Ces pieds permettent alors à l'enfant une vie normale avec des chaussures
ordinaires et d’envisager raisonnablement une activité physique sans
restriction et indolore.